Je suis une créature sociale. Mes amis prennent une belle place dans ma vie, de même que ma famille. Pour le moment, j’écoute les consignes et je m’isole le plus possible. Je reste chez moi. Ma jumelle est à Montréal, mais comme son mari revient de voyage, ils sont en quarantaine complète. Je ne voyais qu’elle depuis deux semaines.

Toute seule pour deux semaines?

J’aime bien vivre en solo dans mon bel appartement plein de plantes, mais parfois ça me pèse un peu. Surtout pour les repas du soir. D’habitude, j’ai quand même une vie sociale bien remplie, travaillant sur un campus universitaire et ayant plein de belles sorties.

Quand j’ai réalisé que j’allais devoir rester seule pour quelques semaines, j’ai eu, je l’avoue, un bref moment de désespoir. Un sentiment étrange. Je vis seule, donc je suis seule. J’ai ressenti un grand vide. J’ai failli me rouler en boule. Mais je me suis vite ressaisie. Je ne suis pas seule.

Peut-être que toi aussi, qui lis cette lettre, tu t’es senti ou tu te sens au bord du vide. Voici comment passer par-dessus ce sentiment, de la plus belle façon qui soit.

Faire les premiers pas

Quand j’avais 19 ans, ma mère m’a offert un livre que j’ai bien dû lire 100 fois. Une des phrases qui m’a le plus marquée (je ne peux pas vous la citer – j’ai prêté mon livre à quelqu’un!), disait à peu près ceci : quand tu te sens seul, n’attends pas que les autres viennent te chercher. Lève-toi et va t’asseoir avec eux autour du feu.

Toute ma vie j’ai essayé de mettre ce conseil en application. Et tu sais quoi? Ça marche. C’est même merveilleux. Les gens ont parfois peur les uns des autres. Mais as-tu déjà remarqué ce qui arrive quand tu souris à un inconnu dans la rue? Son visage s’éclaire. C’est comme si nous n’attendions qu’un signe amical pour nous ouvrir et sourire à notre tour, rassuré.

Sois cette personne qui sourit en premier. Et ta vie n’en sera que plus riche et plus belle.

Partager ses connaissances

J’avais une grand-tante, la sœur de ma grand-mère maternelle adorée, qui était une religieuse. Elle vivait dans un couvent. J’allais parfois lui rendre visite. Toute ma vie, elle m’a répété cette phrase : « Sers-toi des beaux talents que le Bon Dieu t’a donnés. »

Nous avons tous des talents. Chaque personne a des connaissances que tout le monde n’a pas. Tu en as. Peut-être que tu fais le meilleur pain aux bananes au monde. Peut-être que tu donnes des cours de danse, de chant ou de yoga. Peut-être enseignes-tu la peinture ou l’aquarelle. Ou alors tu es fantastique pour t’occuper des plantes. Ou pour apprendre des tours à ton chien.

Tu te sens seule? Donne. Partage tes connaissances. Ça n’a jamais été aussi facile que maintenant, avec Facebook, Zoom, Instagram, YouTube. Tu pourras aider une personne, peut-être 10, peut-être 1000, avec une tâche qui, pour toi, est facile. Et alors, je te promets que tu te sentiras connecté aux autres!

Rassembler (ou répondre à l’appel)

Tu te sens seul? Rappelle-toi que certaines personnes sont peut-être encore plus seules que toi. Ils sont peut-être vieux et sans enfants, sans conjoint. Peut-être incapable de quitter leur domicile à cause d’une mobilité réduite.

Rappelle-toi que plein d’autres personnes se sentent seules, elles aussi, en ce moment précis.

Rassemble-les. Trouve-toi un projet rassembleur. Tu peux utiliser la plateforme Zoom gratuitement ou encore créer un groupe Facebook. Persévère un peu; peut-être que ça prendra quelques jours avant d’avoir un auditoire, mais c’est correct!

Ce n’est pas tout le monde qui est capable de créer un groupe – parfois, la technologie est une barrière. Si tu es capable, vas-y! Sinon, réponds à l’appel de celles et ceux qui te tendent la main et qui t’offrent de partager leur temps avec toi.

Rendre service

Si tu te sens seule, rappelle-toi aussi que tu peux aider les autres de plusieurs façons. Il y a en ce moment un besoin criant de bénévoles partout. Une grande proportion des gens qui donnent de leur temps sont des personnes âgées qui doivent maintenant rester chez elles. Les organismes sont donc mal pris. Les banques alimentaires sont un bon exemple.

Tu n’as jamais fait de bénévolat et tu y penses depuis longtemps? C’est le moment d’oser! Le gouvernement a annoncé aujourd’hui même un nouveau site pour coordonner les efforts. Vous pouvez vous inscrire à jebenevole.ca. Tu peux aussi, bien sûr, t’adresser directement à un organisme.

Les besoins sont multiples : faire des courses pour les aînés ou les malades, des appels quotidiens aux personnes seules et âgées (tu peux le faire même si tu es en quarantaine!), de la coordination de bénévoles et de la distribution d’information.

Aider son voisin

Finalement, si tu hésites à te joindre à un groupe de bénévoles, tu peux toujours tendre la main à tes voisins. Ça peut être aussi facile que de leur écrire un petit mot comme ça, à déposer dans leur boîte aux lettres :

Salut, ici Mariève, qui habite sur ta rue. Je voulais que tu saches que si jamais tu as besoin de parler à quelqu’un ou si tu as besoin d’aide, tu peux m’écrire/me téléphoner à tel numéro ou telle adresse courriel. Je peux aller chercher de la nourriture ou des médicaments pour toi. Si je peux, je serai là pour t’aider, sinon, j’essaierai de te référer au bon endroit. Tu n’es pas seul!

Peut-être que 9 personnes sur 10, voire 99 % des gens n’ont pas besoin de l’entendre, mais imagine que tu puisses aider la personne seule, âgée ou jeune, malade ou pas, qui en a vraiment besoin dans ta rue. Imagine si tout le monde faisait cela.

Trouver un équilibre

Une dernière chose. Si vous avez plus de 70 ans : restez chez vous! Profitez du fait que plein de gens sont en arrêt de travail forcé et ne demandent rien de mieux que d’être utiles. Donnez-leur cette chance. Vous y trouverez du réconfort et, qui sait, peut-être de nouvelles amitiés. Laissez-nous vous aider, vous distraire, vous parler.

Et si tu es dans la catégorie de gens qui veulent et peuvent prêter main forte, n’oublie pas que tout est une question d’équilibre. Par besoin de faire 80 heures de bénévolat par semaine. Garde-toi du temps pour relaxer, loin de l’écran. Du temps pour lire. Méditer. Bouger. Vivre tes émotions, les agréables comme les moins plaisantes.

C’est dans les moments difficiles qu’on grandit et qu’on apprend le plus.

Bonne quarantaine,

Mariève
xx